Accueil > Articles > Le sacré et le profane > Pas une deuxième fois en se taisant

Pas une deuxième fois en se taisant

samedi 21 novembre 2015

De nombreuses personnes ont été choquées du communiqué d’une des principales organisations d’extrême-gauche qui disait dès samedi que « Cette barbarie abjecte en plein Paris répond àla violence tout aussi aveugle et encore plus meurtrière des bombardements perpétrés par l’aviation française en Syrie  ». De nombreux militants, sans être surpris de cette rhétorique, éprouvent un malaise, pas seulement àcause d’un seul communiqué – on en trouve des bien pires – mais surtout parce que les discussions sur le terrain redeviennent difficiles. Les réactions aux attentats d’une partie de l’extrême-gauche ont en effet réactivé, voire amplifié par rapport àjanvier, des incompréhensions et des divisions.

Cette fois-ci, les terroristes islamistes n’ont pas attaqué « des blasphémateurs et des juifs  » , pour reprendre une formule puante mais révélatrice. Cette fois-ci, ce sont des gens abattus dans la rue sans aucune discrimination de la part des assassins, dans le tas. On aurait pu croire que même les anti-impérialistes pro-Hamas ou les éponges de la pénétration d’idées extérieures àl’extrême-gauche dans celle-ci (tolérance aux convergences rouges-brunes, conspirationnisme, antisémitisme, racialisme, rejet total de la laïcité, etc), même eux donc se seraient « calmés  » par rapport àjanvier. Qu’ils refusent d’être Charlie soit. Mais là? Et pourtant on a vu refleurir, alors même que les hôpitaux de Paris étaient pleins de blessés graves, des communiqués et des discours plus problématiques les uns que les autres : manque de compassion pour les victimes, explication dans le plus ou moins franchement « on l’a bien cherché  », auto-censure sur l’islam politique par peur de réactions contre les musulmans ou supposés tels.

Face àcela, nous devons être capables de tenir bon sur quelques axes importants :

  • faire preuve d’empathie réelle avec les victimes, ne pas réciter une leçon comme en toute circonstance sur un ton hautain et méprisant, ne pas caractériser àla va-vite les rassemblements en hommages en victimes de « réactionnaires  ».
  • ne pas hésiter àcaractériser l’islamisme djihadiste de Daesh comme fasciste, ou au minimum carrément fascistoïde : anti-ouvrier, anti-femmes, anti-humain, avec des méthodes terroristes haïssables que RIEN ne justifie, pas même notre [sic] propre impérialisme.
  • affirmer notre droit àcritiquer l’islam politique comme courant réactionnaire, même dans ses formes non-terroristes, notre droit àcritiquer toutes les religions aussi. On ne peut pas soutenir la résistance des kurdes au Moyen-Orient et s’interdire tout ici par crainte des récupérations racistes.

Il y aura d’autres attentats, d’autres colères contre la bêtise des mêmes discours. Il nous faut désormais faire avec. Dans ce contexte, il nous faut exister, avec notre voix.

Stéphane J.

[Repris de La Bataille socialiste.]