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Frontière franco-italienne : Sur l’expulsion de "chez Jesus"

vendredi 19 octobre 2018

Ils ont expulsé "Chez Jesus". 14 camionnettes, plusieurs voitures de police et carabinieri, l’éternel troupeau bien fourni de digossini tout fiers. Ils sont arrivés à7h40 le mercredi matin. Ils ont défoncé la porte avec un bélier et un marteau, et ils sont entrés.

Le prêtre qui nous a dénonce, Don Angelo Bettoni, ne s’est pas montré. Le maire si, en revanche. Il était avec la police en train d’inspecter les locaux pendant qu’ils jetaient dehors les vêtements, les tables, les couvertures, les matelas restants. Pendant qu’une pelleteuse arrivait pour tout débarrasser, ils mettaient des grilles aux fenêtres. Mais la position du maire était connue, depuis le début il appelait àl’expulsion, parce que Chez Jesus "menaçait les activités économiques du pays et faisait augmenter le flux de migrants (en le rendant plus visible) étant donné qu’il donnait de la nourriture et un endroit pour dormir."

Ils ont tout se suite séparé, comme de juste d’après leur catégories, celleux qu’ils considéraient "migrants" et celleux qu’ils considéraient "anarchistes", "No Border", ou comme ils veulent. Les premiers ont été emmenés, pour un "contrôle d’identité", probablement àla procure de Bardonnèche. Il parait que deux d’entre elleux ont été relachéEs parce qu’ils étaient "en demande d’asile". Le troisième, en revanche, a reçu un décret d’expulsion. Les autres ont tous été bloqués pendant des heures par les cordons policiers et ont été inculpés.

Ils nous ont expulséEs parce que, comme cela avait été approuvé àl’unanimité par le Conseil de la Ville Metropolitaine de Turin le 5 octobre, il faut "rendre àla vraie politique" (cit. Monica Canalis, conseillère PD, direction marketing Intesa SanPaolo). Ce qui signifie, comme explicité par le nouveau décret sécurité-immigration de Salvini, le contrôle et la gestion totale de celleux qui arrivent en Italie sans les "bons" papiers. Cela signifie rendre "illegales" des milliers de personnes grâce àl’élimination de la Protection Humanitaire. Cela annonce plus de rafles, de centres de rétentions de déportations. Ils veulent de nouveaux esclaves, disposés àtravailler pour un rien, sous la menace constante des papiers ou du centre de rétention. Et si ils réussissent àse rebeller ils seront bloqués ou bien leur demande d’asile sera révoquée, étant donné qu’àprésent la participation seule àune manifestation suffit àêtre catégorisée "sujet dangeureux".

"Chez Jesus" s’est toujours opposé àtoutes les formes de sélection et de contrôle. Dans ce refuge, personne ne demandait ses papiers àpersonne, personne ne gérait, personne ne contrôlait. C’était un lieu pour s’organiser ensemble contre les frontières, pour celleux qui veulent les traverser et celleux qui veulent les détruire, de façon libre et autogérée, afin que chacunEs puisse choisir où et comment vivre, sans qu’une frontière ne brise la vie et les choix. A l’extérieur du business de l’accueil et de l’expulsion, loin du business des passeurs.

L’évêque de Susa, A. B. Confalionieri, a exprimé sa satisfaction par rapport àl’opération d’expulsion menée par les forces de police. C’est un prêtre qui nous a dénoncés. C’est avec l’Eglise que la Préfecture a préparé l’expulsion, en sauvant la face avec l’ouverture du lieu àOulx. Et comme le rappelle ce même Evêque, "l’eglise valsusine a collaboré avec d’autres structures pour ouvrir le nouveau centre d’accueil àOulx, plus adapté aux exigences des étrangers". C’est àdire : un lieu ouvert de huit heures du soir àhuit heures du matin à15 kilomètres de cette frontière que celleux qui veulent aller en France essaient de traverser et où les personnes sont refoulées.

L’Eglise possède 20% du patrimoine immobilier présent en Italie, pour une valeur de plusieurs milliers de milliards d’euros. Un empire de briques, en pratique. Une multinationale immobilière, pleines se structures et d’argent. Qui d’un côté fait sa propagande àcoup de rhétorique "de l’accueil", de l’autre qui expulse un local sous l’église qui a donné refuge àdes milliers de personnes pendant ces 7 mois, et qui s’implique dans la gestion et dans le contrôle des migrants.

C’est aussi pour ça qu’ils ont expulsé "Chez Jesus". Question d’argent, en plus de politique.
Et ils sont tous contents. L’Etat français et ses gardes, qui réussissent àmieux garder le contrôle du flux de personnes dirigées vers la France. L’Etat italien, qui n’aime ni les lieux ni les espaces autogérés, fait respecter sa lois et "rend àla propriété régulière" les locaux sous l’église. L’Eglise, propriétaire des locaux ; ses coopératives qui se feront de l’argent sur la gestion du lieu ouvert àOulx. Les activités commerciales de Clavière, qui espèrent voir ainsi disparaître les migrants de passage se dirigeant vers la France qui détruisent le tourisme.
Le ferrailleur de Gravere, qui s’est fait des sous en mettant les grilles aux fenêtres. L’entreprise qui a expulsé physiquement le lieu et tout jeté àla décharge.
ChacunEs a ses responsabilités. Nous ne l’oublierons pas.

Nous invitons toutes et tous àdes actions diffuses. Contre les frontières et leur dispositif. Nous rappelons par ailleurs que l’Eglise a tout de même un rôle de premier plan dans notre expulsion.

La lutte aux frontières ne s’arrête pas. Le premier rendez-vous est sous les murs du CPR de Turin, ce dimanche à16 h.

Email de contact : info_AT_passamontagna.info

[Repris (et revu) d’Indymedia.]