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Etats-Unis : De Ferguson àOakland, « nous allons brà»ler toute cette merde  » (24-25 novembre 2014)

vendredi 28 novembre 2014

Lundi 24 novembre, la justice américaine a rendu publiquement sa décision de non-lieu pour le flic Darren Wilson, qui a tué le jeune Mike Brown le 9 aoà»t 2014. Un scénario d’impunité connu et attendu, maintes fois vécu àtravers le monde, d’Athènes àFerguson, en passant par Paris. Mais nous n’avons rien àattendre de l’Etat [1], vu que ses mêmes agents armés et assermentés éliminent, enferment quotidiennement des centaines d’indésirables parce que noir-es, pauvres et/ou insoumis. Il ne faut d’ailleurs pas oublier que cette mise en scène de l’Etat américain (soutenu par les réactionnaires et les médias) avait pour but de faire rentrer les citoyens au bercail, avec comme objectif de rétablir la paix sociale alors même que les feux de la révolte illuminaient les rues de Saint-Louis et du Missouri [2]. Cette délibération du grand jury, reportée de jour en jour, a permis àl’Etat de pouvoir se préparer àl’explosion de rage collective – notamment en décrétant l’état d’urgence et en préparant ses troupes (tous les corps policiers, ainsi que la Garde Nationale (l’armée)). De nombreux commerces s’étaient aussi barricadés en prévision du verdict… En vain.

Passons en aux faits. La ville de Ferguson a rapidement brà»lé. Au milieu des chants comme « Â nous allons brà»ler toute cette merde  », les flics ont été caillassés et leurs véhicules retournés, détruits àcoups de pierres ou par les flammes (10 détruits au total, dont 2 par incendie). 150 coups de feu contre la police (d’après Jon Belmar, le chef du service de police de St. Louis qui a déclaré « Â Ceci était probablement pire que la pire nuit que nous avions eu en aoà»t  ») et 3 flics blessés. Les médias français parlent « Â d’une douzaine de bâtiments incendiés  », sans en dire davantage. Mais ày regarder de plus près, on s’aperçoit que ce qui a été carbonisé est tout ce qui accumule la richesse et la marchandise que flics et milices privées protègent : au moins un centre-commercial, un entrepôt de marchandises, des commerces, un magasin de pièces d’automobiles... Les magasins, avant d’être incendiés, ont été soigneusement pillés et saccagés. Le magasin qui avait appelé les flics juste avant le meurtre de Mike Brown, n’a une nouvelle fois pas été épargné par les pillards. Comme le dit le journal en ligne thedailybeast.com, « Â la situation était trop dangereuse pour que les pompiers fassent leur travail.  ». Le mardi après-midi, plusieurs entreprises le long de Florissant Avenue West étaient déjàfermées.

Boutique on West Florissant Avenue in St. Louis

Une jeune femme, en face du magasin pour pièces automobiles qui brà»lait àFerguson, résumait la situation en cinq mots : « Â ce n’est que le début  ».

Au total, près de 60 personnes ont été interpellées dans le comté de Saint-Louis : 32 arrestations pour pillage, et 29 pour “rassemblement illégal†Pour la soirée de mardi 26 novembre, le gouverneur du Missouri Jay Nixon a annoncé l’envoi de troupes supplémentaires de la Garde nationale sur Ferguson, passant à2200 soldats au lieu des 700 de la veille.

Lors d’une conférence de presse avec le clergé local ce mardi après-midi, le maire de Ferguson, James Knowles III, a dit cyniquement que “malheureusement, la garde nationale n’a pas été déployée àtemps pour sauver l’ensemble de nos entreprises†. Mardi soir, même si chaque commerce, banque était protégé par des soldats de la garde nationale, la rage s’est délocalisée devant le bâtiment de la mairie, où les vitres ont été explosées. Un véhicule de la police a aussi été incendié. Il y a eu 44 arrestations.

Ailleurs

Des manifs ont eu lieu partout àtravers pays. A Seattle, les lycéens sont descendus dans les rues contre « Â le racisme de la police  », puis dans la soirée, des manifestants ont bloqué plusieurs endroits d’une autoroute sans que les flics parviennent àles stopper et donc àfermer momentanément l’autoroute. Des pierres, bouteilles et feux d’artifices ont été lancés sur les flics, qui ont répliqué par des grenades assourdissantes et lacrymo. La foule s’est ensuite déplacée àtravers le centre-ville, une vitre d’une banque Wells Fargo est tombée àMadison. Plusieurs slogans contre la police (“FTP†) ont été peints àla bombe àla Sixième Avenue, Pike Street, Ninth Avenue et Madison Street. 5 personnes ont été interpellées.

Deux rassemblements ont eu lieu, un àWestlake à18h et un autre au centre de Seattle à19h. A 19h30, environ 200 à300 personnes àPike and Broadway. Les organisations et partis de gauche ont une fois de plus rempli leur rôle de flics sociaux, tentant de s’interposer entre les flics et celles et ceux qui font le choix de la révolte, tout en étant plus préoccupés àvendre leurs programmes (et donc àréformer l’Etat et sa police). Le récit se termine par “N’hésitez pas àexprimer votre rage àtout moment et n’importe où†. Un long résumé de cette soirée du 24 novembre àSeattle est disponible en anglais sur pugetsoundanarchists.

Deux manifestants ont été arrêtés àNew York. Le premier a été arrêté àTimes square après avoir lancé de la peinture rouge sur le chef de la police Bill Bratton et ses gardes du corps lundi soir. La deuxième arrestation a eu lieu sur une rampe d’accès du Triborough bridge (ensemble de trois ponts qui relient des arrondissements de Manhattan, du Queens et du Bronx), où s’étaient rassemblés certains manifestants après minuit. Un homme de 30 ans, non identifié, a lancé une canette vide contre un policier, le blessant légèrement àla tête. L’homme arrêté a également été légèrement blessé. Aucune charge n’avait encore été prononcée contre lui mardi matin, selon la police.

C’est àOakland (Californie) que la conflictualité avec l’existant a été la plus élevée : plus de 2.000 personnes ont bloqué une autoroute. Plus tard dans la nuit (vers minuit), plusieurs commerces ont été pillés et sacagées, (dont un starbuck sur Ninth Street qui s’est fait chourrave des stocks de grains de café et le magasin Smart & Final qui s’est fait exproprier de la boisson notamment) ; des poubelles ont été incendiées àtravers les rues de Broadway. Au moins deux banques ont été attaquées : celle de la Wells Fargo bank à12th and Broadway (fenêtres et portes brisées) et une autre de la Comerica bank , située juste en face et qui a dà» être fermée mardi matin. Les flics ont arrêté 39 personnes pour pillages, refus de se disperser, attaques contre la police.

Reformulé de leur presse (US et française)


A Pittsburgh (récit depuis anarchistnews) :

Environ 30 personnes se sont rassemblées àLiberty Avenue et Ella à18 heures dans l’obscurité pendant une marche de solidarité avec Ferguson et contre la police. Ce fut un taux de participation impressionnant pour un événement qui a été appelé durant la journée. Presque tout le monde qui est venu était vêtu de noir et le visage bien couvert.

La marche a soudainement commencé lorsqu’une boîte àjournaux [de la presse] et une poubelle ont été balancées àtravers la rue. Elle a continué àl’est sur liberty ave. prenant une voie de circulation, tout en balançant des débris dans la rue derrière nous. Des cris de “Fuck the police†ont été hurlés et chantés. Une banderole disant “flics, porcs, assassins†a été portée tout le long. Un fumigène a été allumé. La police s’est montrée àquelques rues de la manif avec une camionnette, maintenant une grande distance derrière nous. Il semblait clair qu’ils n’étaient pas intéressés par une confrontation. Les personnes présentes sont restées en bloc ensemble.

Après avoir serpenté àtravers les allées, nous sommes retournés àla liberty Ave vers l’ouest en passant par Bloomfield. Juste avant la fin de la marche, un guichet automatique de billets a été brisé. La marche s’est dispersée avec succès dans les rues étroites derrière Liberty et aucune arrestation n’a été faite. La manif a pris fin en moins de 30 minutes et n’est pas entrée en conflit avec d’autres manifestations dans la ville.

Comme une expression collective spontanée de rage, la manif a été un succès, même si avec du recul beaucoup plus de destruction aurait pu être réalisée, en plus le fait de communiquer avec les passants. On espère que les leçons apprises et la confiance acquise ce soir seront utilisées de manière créative dans les prochains jours.


Une caisse de soutien financier avec les personnes arrêtées lors des émeutes dans le Missouri a été créée. Sinon, la solidarité dans la révolte contre la police, que ce soit àFerguson comme àToulouse ou Nantes peut s’exprimer partout par l’action directe (comme c’est le cas depuis un moment en France et en Europe suite àla mort de Rémi et de toutes les personnes assassinées par les flics)… ànous de s’organiser et d’agir contre ce monde de domination et de mort.

En France, aux Etats-Unis comme partout, guerre àla police et àson monde !

[Repris du Chatnoirémeutier.]


[1Il ne sert àrien d’énumérer la liste des personnes tuées sous les coups de la police, dont nous ne connaissons qu’une partie infime… celle que le pouvoir est bien contraint d’admettre. On peut aller lire ce texte publié dans lucioles n°15 : àpropos des slogans comme « vérité et justice  », qui reviennent souvent dans les manifs contre les violences policières.

[2Et donc de vider en grande partie les rues …Voir la liste des récits de manifs anti-police d’aoà»t 2014 et des actions de solidarité avec les révoltés du Missouri : http://www.lechatnoiremeutier.antifa-net.fr/?s=Ferguson